Football et musculation : comment bien préparer sa saison ?
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Football et musculation : comment bien préparer sa saison ?

19 min

Introduction

En pré-saison, la préparation physique et plus particulièrement la musculation et le renforcement musculaire, sont un passage obligé à la pratique régulière et exigeante du football. Axée sur le développement et l’optimisation des nombreuses qualités physiques inhérentes à la discipline (endurance, puissance, explosivité, vitesse, coordination …), l’organisation de cette période est rythmée par le quotidien de tout entraîneur : la contrainte de temps.

Ainsi, les périodes allouées à la préparation technique, tactique et « athlétique » (terme grandement utilisé dans le milieu du football) sont souvent limitées* pour aguerrir complètement dès les premiers matchs officiels, chaque joueur ou joueuse aux nombreuses exigences de la compétition. La préparation physique ne pouvant occulter tous les aspects technico-tactiques prédominants, qu’elle doit en revanche, obligatoirement consolider. Tout en s’adaptant à l’environnement si particulier du football. Il est dès lors primordial d’être bien organisé(e) et surtout efficace pour proposer des contenus efficients et cohérents en adéquation avec la pratique (éviter l’entraînement concurrentiel !), le profil du joueur ou de la joueuse, le niveau d’expertise et les objectifs fixés (savoir où l’on va), le poste, le système de jeu (Bradley et al., 2010)1, sans toutefois omettre un axe également fondamental pour la performance aussi bien individuelle que collective : la prophylaxie.

Le football étant le sport où l’exposition à la blessure (environ 5 blessures/1000 heures de pratique) et la période d’absence qui en résulte sont les plus grandes comparé aux autres sports (Ristolainen et al., 2010)2. La tendance actuelle prouvant que les équipes qui ont les meilleurs résultats au cours d’une saison sont celles qui ont une plus faible occurrence aux blessures et une plus grande disponibilité de leurs joueurs (Podlog et al., 2015; Carling et al., 2015)34. Les footballeurs amateurs étant moins soumis aux graves lésions (excepté les blessures ligamentaires au genou) comparées aux footballeurs professionnels (Herrero et al., 2014)5. En conséquence, la politique couramment adoptée dans les clubs est la réduction du temps accordé au renforcement musculaire au profit de celui consacré à la récupération. Les dernières données ne confortent cependant pas cette stratégie.

L’état de forme au moment de la reprise est donc déterminant pour la qualité de la préparation, et il en va de soi, pour celle de la saison à venir. Un joueur en méforme augmentant ses chances d’être confronté à divers traumatismes (Gabbett et al., 2016)6. Mieux vaut donc se maintenir en condition. Comment ? C’est ce que nous allons voir…

*Pour la saison 2016-2017 de Ligue 1, et selon les calendriers communiqués, chaque club a bénéficié en moyenne de 46 jours de préparation entre la reprise et la première journée de championnat. Le premier match amical est intervenu en moyenne 13 jours après le premier jour. A titre de comparaison, pour la même saison en Premier League, les Clubs ont eu en moyenne 41 jours de préparation pour 49 jours « off-season » entre la fin du championnat et le début de la “pre-season” (moyenne de 44 jours en Ligue 1). La première confrontation amicale ayant lieu en moyenne 11 jours après. (PDF : Ligue 1 (2016 2017) et Premier League (2016 2017)).

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Préparation des joueurs du Paris Saint-Germain avant leur premier match amical contre West Bromwich Albion (saison 2016-2017).

Avant d’en venir aux différentes orientations proposées concernant votre préparation athlétique et afin de mieux en comprendre la réflexion, je vous invite à lire les quelques points suivants qui retracent l’intégration (très) progressive de la musculation dans le processus d’entraînement du footballeur, indiquent les exigences du football, le profil type du joueur par poste et les blessures les plus fréquentes; pour aboutir aux conséquences physiologiques induites par la phase de transition.

Place de la musculation dans le football ?

Je me souviens encore de cette année 2006 – année de la Coupe du Monde en Allemagne et du dorénavant célèbre coup de tête de Zinedine Zidane à Marco Materazzi durant la finale perdue contre l’Italie – où, dans le cadre de mes études, j’effectuais au Centre National du Football (CNF) à Clairefontaine, des recherches concernant la place de la préparation physique et de la musculation dans la discipline. Dans ce cadre (et suite à une discussion avec Jean Gallice, le responsable, à l’époque, de la préparation physique à la DTN), j’avais notamment pu me rendre compte à quel point la musculation fut jusque dans les années 1990, considérée comme incompatible avec la pratique du football de haut niveau. Époque durant laquelle, Gilles Cometti se fit remarquer (entre autre) en … Italie puis en France en remettant en cause au travers ses méthodes modernes de musculation et un exposé à Turin, les fondements du travail physique du footballeur jusqu’alors essentiellement basés sur le développement des capacités aérobies. Et sa proposition d’inverser « la pyramide de l’endurance » pour développer la puissance du joueur en partant d’efforts explosifs (figure).

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« Pyramide de l’endurance » inversée selon Gilles Cometti

Ce sont des fondements intéressants, mais le jeu a depuis beaucoup évolué et les exigences avec. Il faut donc prendre garde à toutes « les périodisations traditionnelles devenues vieillissantes et obsolètes. » (Young, 2014)7.

Aussi, replaçons la musculation dans son contexte. Bien utilisée, elle est un outil en football pour : (McGuigan et al., 2012; Yamamoto et al., 2008)89

  • Renforcer sa musculature superficielle et profonde
  • Améliorer ses qualités physiques de force, de vitesse, de puissance, d’accélération, d’endurance, de coordination…
  • Développer et entretenir son équilibre et sa proprioception
  • Optimiser son rendement de course (↗︎ caractéristiques neuro-musculaires, ↗︎ énergie élastique stockée)
  • Contribuer à prévenir et limiter de blessures (cf. dernière partie sur la part de l’approche préventive)

À contrario, mal réalisée, elle peut représenter un facteur de risque pour son intégrité et du même coup pour sa pratique et sa progression à moyen et long terme.

L’approche prophylactique en musculation est donc centrale pour votre progression et votre performance globale durable en football.

Les exigences du football

D’après l’étude de Bloomfield et al. (2007)10, le football peut être considéré comme un sport alactique-aérobique constitué d’efforts intermittents à haute intensité entrecoupés de périodes de récupérations incomplètes : la capacité aérobie (Andrzejewski et al., 2012; Helgerud et al., 2001)11 comme les courses linéaires avec et sans ballon (Faude et al., 2012)12, en sont des facteurs de performance hautement prépondérants. Les footballeurs courant en moyenne 10 à 12 km par match ce qui correspond à un rythme moyen de 7 km/h (Young, 2014). La charge aérobie lors d’un match de haut niveau pouvant représenter 75% de VO2 max à une intensité moyenne proche du seuil anaérobie (80 à 90% de la FC max) (Stølen T. et al, 2005)13. Bloomfield et al. soulignent également les nécessités physiques particulières pour les joueurs de champ par poste (défenseur, milieu de terrain, attaquant), en terme de volume d’actions ou de jeu (temps passé à courir, sprinter, sauter, marcher, rester immobile) plus que d’intensité.

« Pour être en forme en football, tu dois être capable de courir vite. À plusieurs reprises. Avec un minimum de récupération. » (Mike Young)

Profil type du footballeur (par poste)

Ce que confirme l’étude de Andrzejewski et al. (2012)14. Sur une moyenne de 11,3 km environ parcourus par l’ensemble des joueurs étudiés durant la saison 2008-2009, et selon les données obtenues auprès de l’UEFA, on s’aperçoit en distinguant les postes que les milieux de terrains courent plus que les attaquants et que les défenseurs (11,8km > 11,4km > 10,9km). La position de l’attaquant exigeant des courses plus intenses et des contacts plus fréquents tandis que la position du défenseur nécessite une alternance d’actions plus constante que pour les deux autres postes, selon Bloomfield et al.

Chez les féminines, même constat concernant l’intensité des efforts par poste où l’on remarque qu’elle est moindre chez les défenseurs par rapport aux milieux de terrains et aux attaquants, les joueuses de niveau international ayant une meilleure aptitude aux courses de haute intensité vis-à-vis des joueuses de l’élite (Mohr et al., 2008)15. La performance lors de ce type d’effort est donc prépondérante dans le football féminin. A noter concernant la fatigue, et selon la même étude, qu’elle apparait de manière temporaire au cours d’un match et à son terme.

D’un point de vue physique et physiologique (Sporis et al., 2009)16, les gardiens de but dont nous n’avons pas encore parlé, sont aujourd’hui parmi les plus grands, les plus lourds, les moins rapides de l’équipe, avec la capacité d’être, vu leur poste, très explosifs (tests en squat jump et countermovement jump). L’étude confirmant les autres observations faites jusque-là : les attaquants étant les joueurs les plus rapides sur 5, 10 et 20m; les milieux de terrain ont les valeurs physiologiques les plus élevées (VO2 max, FC max, lactate sanguin) et les défenseurs sont très performants en saut vertical (squat jump).

Traumatologie

Selon Barroso et al. (2015)17, entre 10 et 55% des blessures surviennent lors d’une pratique sportive. De ce point de vue traumatologique, 32 % des blessures recensées en football sont musculaires, pour la plupart localisées au niveau des muscles de la cuisse et plus particulièrement au niveau des ischio-jambiers (Hallén et Ekstrand, 2014)18. Si elles intervenaient pour la grande majorité d’entre elles au cours des matchs, ces blessures aux ischio-jambiers (IJ) sont de plus en plus fréquentes lors des entraînements avec une nette augmentation chaque année (+4%) depuis 2001 (Ekstrand et al., 2016)19. Il semblerait que leur survenue soit assez fréquemment associée aux actions de décélération faisant suite à un effort (Knowles, 2016)20. Comme le précisent ces auteurs, le défi majeur serait de parvenir à « réduire le taux des blessures aux ischio-jambiers durant les entraînements (sollicitations ? exercices de prévention ?), sans pour autant nuire à la performance du match. »

Conséquences physiologiques induites par la phase de transition

D’après Silva et al. (2016)21, la phase de transition entre deux saisons impliquent des adaptations physiologiques :

  • ↘︎ faible à modérée de la composition corporelle
  • ↘︎ modérée de la performance en sprint avec et sans changements de direction (COD: change of direction)
  • ↘︎ faible à modérée de la puissance musculaire
  • ↘︎ importante de VO2 max (15 à 20%) et du temps limite
  • ↘︎ modérée voire très importante de la performance lors des efforts intermittents

Tous ces éléments sont importants à prendre en compte dans un contexte de prévention et d’individualisation. Cette période « off-season » étant une véritable « fenêtre d’opportunité pour (re)construire la saison suivante », envisager la préparation de la pré-saison et la limitation des blessures.

Orientations de la musculation dans la préparation athlétique en football

En nous appuyant sur l’ensemble des observations précédentes, étayons point par point les différents axes proposés en musculation selon les profils et les objectifs à atteindre. Avant cela, rappelons quelques principes fondamentaux dans la manière d’aborder le renforcement musculaire.

Pour idée générale, retenez qu’il est impératif de vous entraîner de manière globale (holistique), « entraînez vos mouvements, pas vos muscles » :

  • Privilégiez les exercices poly-articulaires …
  • … et les mouvements exécutés dans votre plus grande amplitude disponible majoritairement en station debout (et pour ceux qui se demandent pourquoi : vous êtes bien debout sur un terrain non ?).
  • Réservez les mouvements isolés à des besoins spécifiques (faiblesses, asymétries, fatigue, régénération).

Tenez compte de vos caractéristiques, de vos besoins et de vos objectifs (…) Pour vous aider, posez-vous la question suivante : quelles sont mes atteintes et mes limites ? :

  • Anatomo-physiologiques (déséquilibres musculaires, manque de mobilité, difficulté à réaliser certains mouvements…).
  • Antécédents traumatologiques (blessures passées ou récurrentes, opérations…).
  • Physiques (faiblesses, stagnation, méthodes inefficaces ou inadaptées…).
  • Mentales (manque de volonté concernant le travail physique et la musculation en particulier, démotivé(e) suite à différents échecs, impatient(e) et tout vouloir rapidement…).

Pensez qualité avant quantité / technique avant charges : le temps « perdu » à vouloir bien faire les choses c’est du temps de gagné pour limiter les risques de blessure et rester performant. Travaillez selon le modèle agoniste-antagoniste.

Tenez compte également de ces autres principes importants :

  • La qualité de la récupération est aussi importante que celle de l’entraînement (nous y reviendrons).
  • Adaptez chaque séance à votre forme du moment.
  • Ne négligez ni les mouvements préparatoires (cliquez ici pour voir l’article), ni les étirements (où, quand, comment, pourquoi ? : pour en savoir plus cliquez là).

NB : il est à rappeler que tous ces principes ne sont pas exclusifs au football, et sont bien entendu valables à l’ensemble des pratiques sportives collectives ou individuelles.

Les différents axes qui suivent (et qui interagissent entre eux) sont proposés dans un ordre chronologique et selon un agencement tel qu’il doit être envisagé dans une programmation d’entraînement, progressive et pensée pour le plus grand nombre (quel que soit le niveau). Cela ne doit être en aucun cas considéré comme un programme particulier. Mais plutôt une réflexion sur votre préparation physique et la manière d’aborder la musculation et le renforcement musculaire, pour la pratique du football en compétition.

Les mouvements préparatoires

Ces mouvements consistent à mobiliser toutes les capacités en vue de la séance programmée. Ils sont un précepte à réaliser avant chacun de vos entraînements. Outre « l’augmentation de la température, ils sont élaborés pour assurer la mobilité articulaire, améliorer l’équilibre par la proprioception et la stabilité des étages articulaires, recruter les différentes unités motrices, coordonner les contractions inter et intramusculaires et enfin activer le système nerveux central ainsi que toutes les composantes neuro-musculaires. » (Del Moral, 2016)22.

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« Si, si Arsène, les élastiques sont utiles ! » ou quand Arsène Wenger est « sceptique » concernant l’utilisation des mini- élastiques pour l’échauffement dans le football (Source : Vestiaires Magazine)

Réalisés sous forme de mobilisation segmentaire (tableau), ils se poursuivent par des exercices d’activation et de renforcement de la ceinture pelvienne et des fessiers au moyen de mini-élastiques par exemple (même si Arsène Wenger semble douter de ce principe (nous y reviendrons) : image ci-dessus). Ils sont accompagnés de situations de gainage ou d’exercices de renforcement de la ceinture abdominale et lombaire (RCAL).

Le gainage, “coeur” de votre préparation physique

Si la traduction anglaise de l’entraînement au gainage est “core training”, ce n’est pas un hasard. “Core” qui signifie “coeur ou noyau” doit être la base indispensable de votre préparation physique. Il en est même un prérequis. “Le core est le fondement par lequel tout mouvement appendiculaire repose et il inclut la capacité de stabiliser dynamiquement la colonne vertébrale, les hanches, le bassin, les membres inférieurs et les structures abdominales. Il joue un rôle essentiel dans le transfert de puissance au niveau du squelette appendiculaire, se concentrer sur le core est un élément indispensable à l’entraînement physique.” (Strand et al., 2014)23

Ajoutant, “dans le cadre de toute évaluation du risque de blessures (particulièrement pour la prévention des blessures du bas du dos), ou de tout programme d’exercice, le test de performance musculaire (endurance musculaire dans ce cas précis) est souvent inclus dans le cadre d’une analyse des besoins.”

À titre d’information et dans l’idée de vous évaluer en gainage, référez-vous au barème suivant (normes fixées selon les résultats de l’étude de Strand et al. et mon propre barème) :

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Tableau du barème d’évaluation pour le gainage

En pratique : il est préconisé d’effectuer au minimum 3 fois par semaine des exercices de gainage sur les différentes faces (ventrale, latérales, dorsale) pour en tirer le plus grand bénéfice. En variant fréquemment les situations pour une progression constante. On peut alterner avec des exercices d’abdominaux et de lombaires plus classiques (V-Up, Oblique V-Up, Alternate arm and leg lift …) en tâchant à bien les réaliser et les ressentir. Sans oublier le muscle transverse.

Programme : 3 séries de 45 s à 1 min sur chaque face avec le minimum de récupération.

Tous ces exercices préparatoires et de gainage seront placés en début de séance afin de bénéficier de leur principe d’activation neuro-musculaire. Ceci dans une logique tant de contrôle des compensations que préventive (Badiuk et al., 2014)24

“… proposer des exercices qui respectent la courbure lombaire, évitent le cisaillement de la charnière lombo-sacrée et sollicitent significativement les abdominaux, et surtout les muscles profonds para-vertébraux, en étant centré sur la respiration abdominale.”

La proprioception

Lorsque l’on parle de proprioception, on pense tout de suite à l’équilibre et à toutes les formes de plateaux permettant de générer des situations d’instabilité. Seulement attention. Outre l’usage intensif qui va à l’encontre des principes méthodologiques de l’entraînement, en l’occurrence ici la variabilité, ces situations bien qu’elles puissent être utiles pour entretenir un équilibre acquis, ne permettent pas de développer la proprioception à proprement parlé.

La proprioception qui on le rappelle, “est une réponse afférente à la stimulation des récepteurs sensoriels de la peau, des muscles, des tendons, des ligaments et de la capsule articulaire. Elle contribue au contrôle conscient et inconscient de la posture, de l’équilibre, de la stabilité et de la position.” (Baechle et Earle, 2008)25

Ne se cantonner qu’à un seul type de stimulation, c’est réduire le champ des possibilités et brider toute forme de progression.

En ce qui concerne l’intérêt de pratiquer des exercices avec charges additionnelles sur ces plateformes, je vous renvoie à cet article de Xavier Barbier, un autre préparateur physique.

En pratique : si vous suivez toute cette logique, regardez cet autre exercice extrêmement riche réalisé avec charges légères (vidéo). Vous pouvez, comme pour tout travail couplant le renforcement musculaire au développement des aspects proprioceptifs, l’intégrer aussi bien dans la phase préparatoire, que dans votre séance, ou à la fin de celle-ci (contexte de post-fatigue pouvant se rapprocher des conditions de match). Il est même fortement recommandé de varier. L’objectif étant la recherche d’une réalisation adéquate (stabilité, posture, alignement segmentaire) et la qualité de chaque mouvement.

“Des exercices de renforcement musculaire réalisés sur des surfaces instables procurent certes des effets positifs, mais davantage sur le plan postural (renforcement des muscles du tronc avec charges légères) que sur celui de la force.” (Grosgeorge et Farcy)

Le renforcement musculaire

On parle de renforcement musculaire ou de prise de masse (hypertrophie) selon le profil du joueur et les objectifs fixés : on cible le maintien d’un niveau de résistance musculaire compétitif pour un joueur ayant une carrière de niveau avancé, tandis qu’on oriente le jeune joueur vers une forme de travail lui permettant de développer son potentiel.

Les séances de renforcement musculaire sont réalisées sous forme de circuit training (voir le paragraphe sur le développement aérobie), les exercices proposés étant adaptés à chacun(e). Ils font suite aux situations de gainage mises en place en début d’entraînement que l’on peut, pour varier, intégrer dans le circuit. Selon les observations faites et les tests pouvant être réalisés, il convient de se focaliser sur les besoins, les points faibles et les déficits constatés, particulièrement au niveau des membres inférieurs, des fessiers et des ischio-jambiers. Le travail à poids de corps qui peut-être envisagé au moment d’une reprise est extrêmement intéressant (voir séance type ci-dessous).

Des manquements très souvent observés, pensez qu’il est avant tout fondamental de renforcer vos muscles fessiers (article) comme nous venons de le signaler, particulièrement le moyen fessier (faisceaux antérieurs, moyens et postérieurs) qui joue un rôle majeur dans la stabilité/fixation du bassin ainsi que le grand fessier, muscle le plus puissant de notre corps. Ce dernier est déterminant dans la capacité à se propulser horizontalement lors des courses, des sprints et verticalement lors des sauts.

Renforcer ces muscles, c’est également entretenir la synergie musculaire existant entre les muscles fessiers, quadriceps et ischio-jambiers. Et préserver lors des mouvements, l’intégrité et le rôle de chacun. Évitant ainsi tout risque de compensations et de sur-sollicitations préjudiciables pour leurs structures musculo-ligamentaires (ischio-jambiers, quadriceps) comme pour les structures ostéo-articulaires de l’articulation du genou et de la hanche. « Pendant de nombreuses années, dans une perspective préventive […] l’accent s’est porté sur la consolidation de l’articulation du genou avec un oeil fixé sur le ratio de force (et de puissance) entre les ischio-jambiers et les quadriceps; ce qui était une bonne chose. Mais il ne fallait pas pour autant oublier que l’articulation du genou est soumise à la mobilité des articulations sous et sus-jacentes » (cheville et hanche).

« On comprend d’ailleurs mal pourquoi, dans le renforcement musculaire […], il ne soit pas fait d’avantage appel au renforcement des abducteurs et des fessiers puisque la plupart des duels se gagnent latéralement. » (Grosgeorge et Farcy)26

De la même manière, il est fondamental d’insister sur le renforcement des muscles du pied et de la cheville (ce que l’on voit trop rarement), dans une optique préventive (entorses, tendinopathies) et bien entendu de performance (relation pied-sol, pied armé : flexion dorsale).

À titre d’exemple, voici des exercices types de renforcement du bas du corps qui pourrait être présenté et qui reprend globalement tout ce que nous venons de voir :

Séance type à poids de corps (membres inférieurs)Reps
Mouvements préparatoires, activation (pelvitrochantériens et fessiers*) + gainage**3 séries de 45 s à 1 min
Squat unipodal (Pistols squats) ou Back Squat ou Fentes (multidirectionnelles) (sans TRX de préférence)10 à 12 par jambe
Arabesques (vidéo 1 des deux mouvements combinés avec le Pistol squats (sans TRX de préférence)10 à 12 par jambe
Flexion/extension mollets sur step ou escalier30 (2 jambes)
Tibial antérieur, péroniers latéraux (vidéo 2)20 par jambe
Ischio-jambiers sur swiss-ball (vidéo 3)
(exemple tempo : alterner lent et rapide sur la poussée)
20 (2 jambes) ou 10 par jambe
Consignes3 à 4 séries enchaînées
Récup : 1 à 1 min 30

Vidéo 1 : renforcement des quadriceps et des ischio-jambiers en unipodal

Vidéo 2 : renforcement des péroniers latéraux avec élastique

Vidéo 3 : renforcement des ischio-jambiers avec swiss ball

Bien que nous préférons nous attarder sur le renforcement musculaire des membres inférieurs, il ne faut pas omettre celui des membres supérieurs sollicités durant le gainage (épaules/bras – pectoraux/dos), qui suit la même logique. Dans notre approche holistique, l’ensemble des chaînes musculaires et des muscles superficiels et profonds doivent être sollicités et renforcés.

En pratique : concernant les séances plus axées sur la prise de masse, il est suggéré d’employer une charge correspondant à un total de 10 à 12 répétitions par séries (environ 70 à 75 % de 1 RM) pour parvenir idéalement à des séries de 7 à 8 répétitions (environ 80 % 1 RM).
4 à 5 séries enchaînées avec une récupération inférieure à la moitié du temps de travail (utiliser le ratio (voir ci-dessous) : 1:0.25-0.5).
La séance ne devant pas dépasser 1h-1h15.

Dans tous les cas, vous respecterez une certaine progressivité en ce qui concerne les modalités des régimes de contraction : isométrique < concentrique < excentrique (sous-maximal puis maximal).

Ci-dessous, une approche concrète avec des extraits d’une séance de préparation physique de l’Olympique Lyonnais, durant leur stage habituel de pré-saison à Tignes.

Développement de l’endurance (aérobie)

De nombreuses études similaires à celle de Yamamoto et al. (2008)27 ont montré les bénéfices de l’entraînement en résistance sur l’endurance. Ainsi, en vue du développement des capacités aérobies dont on rappelle le caractère déterminant en football (répétitions d’efforts dans un contexte de récupérations brèves et incomplètes) et pour la prévention des blessures (Knapik, 2015)2829 dans la mesure où la condition physique influence l’apparition de la fatigue, le niveau d’attention et de vigilance … le confort physiologique et mécanique – privilégiez l’agencement de vos séances sous forme de circuit training en respectant la logique de l’entraînement holistique. De manière à enchainer vos exercices avec le minimum de récupération entre chaque. Cela est fondamental ! D’autant plus si le joueur est milieu de terrain.

En pratique : la récupération inter-séries doit respecter tout au plus un ratio effort/récupération de 1:0.25-0.5. Par exemple si vous effectuez un enchaînement de 4 minutes, votre récupération sera comprise entre 1 et 2 minutes.
4 à 5 séries seront réalisées.

Pour le maintien d’une activité « cardio » en extérieur durant votre intersaison, j’aime à conseiller des efforts continus et des activités régulières (15 à 60 minutes, 2 à 3 fois par semaine) à votre rythme, qui vous changent de que vous pouvez faire durant votre saison. Car il est important de « couper » pour se régénérer mentalement.

Durant votre préparation, l’alternance d’efforts continus (15 à 60 minutes; 70 à 85% FC max) et d’efforts intermittents est préconisée :

  • Interval training : 3 à 8 min/intervalles – 3 à 5 séries – 85 à 95 % FC max
  • Récupération : 1:0.5-3 (pour 1 temps d’effort : récupération = durée divisée par 2 jusqu’à 3 minutes).

Sachant qu’à mesure que vous vous rapprocherez de la période de compétition, l’intensité des courses sera maximale voire supra-maximale (> 100%). En parallèle, vous diminuerez le volume.

L’objectif étant d’optimiser cette première phase de la préparation physique pour aborder les étapes suivantes, plus spécifiques, dans les meilleures conditions.

Le couple force-puissance (force explosive)

Théoriquement, considérer le développement de la force maximale et de la puissance en musculation, c’est concevoir de travailler avec des charges élevées correspondant à 6 répétitions et moins (>85% 1RM), peu de séries (3 à 5 pour la force maximale, 6 pour la puissance) avec une récupération appropriée (3 à 5 minutes selon le cas).

Vous allez me dire tout dépend du niveau de pratique de chacun et pour reprendre l’idée d’Olivier Bolliet (2013)30 : selon que l’on ai déjà pratiqué ou non la musculation, le niveau d’expertise dans sa discipline ne concorde pas forcément avec le niveau affiché et celui requis pour le développement de ses propres qualités physiques et l’atteinte de ses objectifs sportifs et/ou de performance.

Effectivement vue comme ça, cette partie nécessite un certain vécu en musculation, notamment du fait de la manipulation de lourdes charges ou de l’exécution de mouvements d’haltérophilie, que tout le monde n’a pas, notamment les footballeurs d’une manière générale. Même si il est vrai que les mentalités ont tendance à évoluer. Après, faut-il nécessairement être capable de soulever de lourdes charges pour être meilleur sur le terrain et être plus “explosif” ? Certainement pas. C’est en cela que j’ai souhaité aborder la place de la musculation dans le football en première partie.

Et pourtant comme le présentent Silva et al. (2015)31, les joueurs professionnels ont besoin d’augmenter considérablement leur force pour obtenir de légères améliorations dans certaines actions de courses (accélérations, sprints, changement de direction). Néanmoins, ils mentionnent l’intérêt du développement neuro-musculaire dans l’amélioration des mesures physiques et physiologiques associées à la performance du joueur de haut niveau, et tout l’intérêt d’associer ce type de sollicitations à des mouvements spécifiques du footballeur (transfert).

Seulement comme nous l’avons déjà bien remarqué, la proportion de blessures au niveau des ischio-jambiers notamment, incite à la plus grande prudence, surtout dans un milieu comme le football. Pour autant, cette dernière piste de réflexion sur les facteurs neuro-musculaires pour développer et maintenir les qualités de force et de puissance, nous amène à des éléments intéressants pour tout ce qui concerne la préparation aux efforts de sprints.

Préparation aux efforts de sprints et de changements de direction

Actuellement, l’intensification des déplacements et des CODS pèsent lourdement sur les conditions biomécaniques permettant l’expression de l’agilité et de la vitesse linéaire. En cela, le renforcement musculaire constitue une action de prévention primaire et une voie pour améliorer l’efficience de ces qualités.

Comme présentés dans la séance type de renforcement musculaire plus haut, les exercices à poids de corps choisis sont une introduction au renforcement de l’ensemble des groupes musculaires des membres inférieurs, y compris les muscles du pied et de la cheville. Le travail en appui unipodal trouve tout son intérêt dans la mesure où, en plus d’une sollicitation unilatérale des chaînes musculaires (surtout en cas de déséquilibres droite/gauche liés à la latéralité), participe aux mouvements (mobilité) comme au maintien de la posture (stabilité) et combine – l’équilibration au niveau de l’appui, la proprioception (voir ci-dessus), la coordination, la dissociation segmentaire (tout cela permettant la mise en jeu du contrôle neuro-musculaire) – et à l’avantage de se rapprocher de la biomécanique de course ou des gestes spécifiques du footballeur : la passe, la frappe.

Un préambule à notre piste de réflexion et à la préparation à la course et au sprint. Le tout en respectant notre modèle agoniste-antagoniste, l’accent étant mis sur le renforcement des muscles de la chaîne postérieure notamment les fessiers et les ischio-jambiers afin d’équilibrer avec la mise à contribution des muscles de la chaîne antérieure sur le terrain en particulier les extenseurs de la jambe (quadriceps) et de préparer le travail ô combien exigeant qui suit : la pliométrie.

Outre son avantage consentit dans l’amélioration et le maintien de la performance en force et en explosivité chez le footballeur, et malgré le peu de données scientifiques disponibles le confirmant (Wang et Zhang, 2016)32, la pliométrie, dont l’intensité est directement liée aux déplacements verticaux et surtout horizontaux et aux types de contacts que l’on retrouvent dans le football, permet de se préparer à ces phases de saut, leur réception ainsi qu’aux phases de sprint. Toujours dans cette logique de sollicitations unipodales, il est préconisé selon Grosgeorge et Farcy, « d’entraîner simultanément la proprioceptivité et les exercices pliométriques » par un enchaînement de sauts unipodaux variés et orientés dans toutes les directions (avant-arrière-gauche-droite). Lors de ce genre d’exercice, “il faut veiller à ce que la cheville soit en flexion dorsale (pied armé) – d’où l’intérêt de bien en renforcer ses muscles ! – de façon à étirer suffisamment le triceps dans le but de provoquer ensuite un meilleur renvoi pliométrique.”

Un petit détail vous semblera-t-il. Mais un détail important qui démontre le caractère minutieux, progressif et adapté dont chacun doit faire preuve lors de ce genre de travail qualitatif. En plus d’avoir développé en amont les prérequis suffisants. L’inverse serait contre-productif et dangereux pour l’intégrité du joueur.

« Des charges pliométriques élevées ne peuvent être bien encaissées que si les sujets sont capables de relever correctement en squat deux fois le poids de corps. »

Et justement, parlons de progressivité. L’erreur la plus fréquente concernant le sprint, est de le proposer de manière quasi systématique sous forme d’accélérations précocement intenses (si je puis m’exprimer ainsi) par rapport au niveau de la préparation. Et qui plus est sans se soucier de la phase de freinage extrêmement traumatisante qui le constitue : la décélération. Il ne faut pas oublier que la majeure partie des blessures sont occasionnées lors d’un ralentissement brutal et forcé. D’un auteur que j’ai déjà cité (Knowles), retenez cette phrase : “si tu ne peux décélérer, n’accélères pas”.

Effectivement, le travail pliométrique engagé et adapté aux besoins du joueur, il est impératif suite à la période de transition, de se réapproprier et de combiner les situations d’accélération avec des situations de décélération qui mettent à contribution les structures ostéo-articulaires et musculo-articulaires des membres inférieurs. Et cela avant d’entreprendre un quelconque travail de course à haute intensité. Puisqu’au-delà de la vitesse des déplacements, ce sont ces qualités d’accélérations et de décélérations qui sont déterminantes. Elles doivent donc être soigneusement préparées.

Ces réajustements vont permettre de réintroduire progressivement les différentes actions inhérentes au football.

En pratique : il est conseillé de réaliser sur le terrain, des courses de démarrage à allure modérée suivies de phase de ralentissement progressivement décroissante. Et de s’entraîner en pente de la même manière, en contrôlant ses mouvements avant d’augmenter progressivement son allure à mesure que l’on raccourcit sa distance d’arrêt. En complément du travail de renforcement, comme précisé, qui sera réalisé en salle.

“L’apprentissage de ces différentes techniques (accélération et décélération) doit se faire idéalement à des vitesses lentes puis à des vitesses de plus en plus rapides, sans ballon puis avec ballon.” (Grosgeorge et Farcy).

La vitesse et l’agilité

Autre facteur prépondérant avec l’endurance, la vitesse maximale de déplacement exprimée par la performance en sprint linéaire (RSA : Repeated Sprint Ability) est ce que l’on cherche particulièrement à développer chez le footballeur, notamment chez l’attaquant.

Bishop et al. (2011)33 se sont penchés sur la question. Pour eux, deux théories en ressortent, l’amélioration de la RSA passe par :

  1. L’entraînement à la répétition de sprints
  2. L’amélioration des facteurs limitants de la RSA.

Seulement difficile d’envisager l’une ou l’autre séparément, l’habileté aux sprints étant conditionnée à la fois par la technique qui impose des modalités d’apprentissage particulières. Mais également par les facteurs énergétiques (capacité oxydative, capacité de resynthèse de la phosphocréatine (PCr)), métabolisme anaérobie lactique et nerveux (activation musculaire, stratégie de recrutement).

Sur ce dernier point, s’appuyant sur Cometti (2007)34, Maquet et Ziane précisent : « la vitesse est une qualité neuromusculaire, son amélioration est due à des facteurs nerveux et musculaires, en les travaillant le joueur devient plus performant, sa technique de course (donc son économie de course) s’améliore et il va moins consommer. La récupération dans ce cas ne doit rien aux facteurs énergétiques. » Et bien qu’il soit « aujourd’hui admis que les qualités de vitesse dépendent en grande partie de notre équipement en fibres rapides qui est fortement déterminé génétiquement … c’est loin d’être le seul. » (Grosgeorge et Farcy, 2016).
Le Meur (2014) distinguant en plus de l’entraînement au sprint pour l’amélioration de la technique et de la vitesse dans le cadre de la RSA – l’entraînement spécifique à la RSA, le jeu réduit en situation (SSG) et l’entraînement de la force maximale. Vouloir développer sa performance en sprint n’est donc pas totalement inné, cela s’acquiert par l’entraînement au même titre que le développement d’une autre qualité importante en football : l’agilité.

Selon Grosgeorge et Farcy, l’agilité, autre forme d’expression de la vitesse apparentée au concept de vivacité de Frédéric Aubert, renvoie, si l’on cherche à la définir de manière minimaliste, aux changements de direction rapides (CODS : Change of Direction Speed). Or, comme ils l’expliquent et le démontrent extrêmement bien dans leur ouvrage (s’appuyant sur la publication de Vigne et al., 2011)35, rien ne permet aujourd’hui de mettre en évidence la transférabilité de la performance en sprint linéaire vers cette vitesse à caractère multidirectionnelle (MDSA : Multidimensional Speed and Agility). Bien que l’étude de Buchheit et al. (2010)36 sur de jeunes footballeurs, puisse apporter des indications en faveur d’une correlation entre la progression dans l’habileté à changer de direction et l’amélioration de la RSA lors de l’entraînement aux sprints répétés sous forme navette, ces deux vitesses semblent relativement indépendantes l’une de l’autre. S’expliquant par des exigences physiques et techniques propres à chacune voire opposées : la plus grande prépondérance (corrélée au nombre de CODS avec des angulations importantes) des capacités de décélération et de gainage pour résister aux forces latérales lors des courses slalomées; par rapport aux courses linéaires au cours desquelles les contraintes sont moindres. Et les « formes de corps » s’opposant fondamentalement : chercher à « être haut sur les appuis dans la course cyclique et linéaire ou au contraire être ramassé très bas avec les appuis déportés pour résister à la force centrifuge » lors des changements de directions rapides.

Ces déterminances induisent d’aborder différemment chacune de ces qualités lors de l’entraînement. Pour autant, elles ne doivent pas être totalement distinguées l’une de l’autre mais bien intégrées dans les contenus comme elles le sont dans le jeu. D’autant plus avec le peu de temps qui nous est imparti. Tout l’intérêt des jeux réduits (SSG : Small-Sided Games) prônés par Grosgeorge et Farcy, ainsi que Le Meur. En prenant garde toutefois à la charge biomécanique, physiologique et mentale qu’induisent et qu’exigent sur chaque joueur, ces types d’efforts.

Concernant l’entraînement de la force maximale et de la puissance pour le développement de la RSA, et malgré la problématique de charges lourdes, l’entraînement en résistance même avec des charges plus légères a un intérêt neuro-musculaire. Selon les recommandations issues de l’étude de Bishop, l’entraînement en force explosive doit être associé à l’entraînement classique du sprint, tous deux permettant de manière équivalente le développement de la vitesse maximale de déplacement (Buchheit et al., 2010). Après, tout cela reste une question de conception, la vérité du terrain faisant foi.

Capacité et puissance anaérobie

Aussi d’un point de vue énergétique, l’optimisation de la vitesse maximale par sprint passe par l’amélioration du métabolisme anaérobie (entraînement au sprint, développement de la force explosive, entraînements à haute intensité).

En pratique : selon Young (2014) les modalités d’entraînement au sprint sont les suivantes :

  • distance : 10 à 40 m (durée 1 à 5 s)
  • intensité cible : maximale à supra-maximale (selon la période et les objectifs)
  • ratio effort/récupération : 20 à 40s
  • volume total : 160 à 300 m

En amont, il conseille si besoin des exercices contre résistance ou en côte pour permettre le développement des mécanismes de la vitesse et des qualités physiques appropriées, avec une récupération adaptée (travail qualitatif).

En ce qui concerne la capacité aux efforts répétés (RSA), la fatigue induite est inversement corrélée à la performance initiale en sprint (Bishop et al., 2011). Elle peut être envisagée de la manière suivante, selon une situation plus ou moins proche de celle du terrain :

  • distance : 10 à 30 m
  • intensité cible : maximale
  • ratio effort/récupération : 5 à 10s
  • volume total : < 300 m

Pour terminer sur l’agilité (ou vivacité), les exercices qui, on insiste dessus, doivent être appropriés à la période de la préparation, au profil du joueur … sont réalisés à une intensité comprise entre 80 et 95% du maximum, de manière à stimuler le système neuro-musculaire (Bompa, 2015)37.

  • durée : 5 à 10 s
  • intensité > 90% (période préparatoire), 80 à 85% (période de compétition)
  • séries : entre 5 et 10 en période préparatoire, adaptées en compétition
  • récupération : entre 60s et 90s en période préparatoire, jusqu’à 120s en période de compétition

Retour au calme et récupération

Parce que les phases de récupération sont aussi importantes que les phases de travail, si ce n’est plus … à chaque fin de séance, n’oubliez pas de vous consacrer une dizaine de minutes de retour au calme.

Quelques trucs et astuces ci-dessous …

En pratique : après une séance de bas du corps, vous pouvez par exemple effectuer votre relâchement sur vélo : avec peu de résistance, moulinez 5 minutes en course avant et si le vélo le permet en course arrière. Cela permet de déverrouiller et soulager les zones articulaires sollicitées durant la séance, à savoir les chevilles, les genoux et les hanches tout en permettant un relâchement musculaire. De la même manière, afin de soulager votre dos des contraintes auxquelles il aura été soumis, en plus de vos jambes, suspendez vous à une barre fixe ou allongez vous sur le dos au sol, les jambes surélevées, posées sur un support et relâchées.

Suite à une séance de haut du corps, il existe un excellent exercice pour cela : le pull-over. Ce mouvement est à la fois utile pour développer la masse pectorale et pour mobiliser l’étage thoracique. C’est sur ce dernier point que nous en voyons l’intérêt pour une fin de séance. Avec une charge légère et selon votre amplitude disponible, effectuez cet exercice sur un banc en essayant d’être le plus relâché possible et, sans forcer, d’aller chercher votre amplitude maximale avec la plus grande inspiration lors de l’allongement des bras au dessus de la tête. Revenez ensuite lentement en expirant. Faites 10 mouvements que vous pouvez répéter plusieurs fois.

Sur la question des étirements, « où, quand, comment, pourquoi ? » sachez qu’il est important de les pratiquer régulièrement. En ce qui concerne les modalités, veuillez consulter mon article qui reprend tout ce que vous devez savoir.

“Si votre corps était une maison, on dirait que la récupération est le ciment entre tous les éléments que vous utilisez pour la construire.”

Au final, quelle est la part de l’approche préventive dans tout ça ?

C’est à l’image du football professionnel où, le nombre de blessures recensées lors des matchs ou des entraînements est respectivement en stagnation et en augmentation. Et cela, malgré la mise en place d’entraînements dits préventifs, dans un contexte de réduction du temps dédié au renforcement musculaire (cf. introduction). L’approche prophylactique dont nous parlions en introduction serait-elle finalement ambitieuse ? Il faut croire que oui.

Ces entraînements préventifs (« preventive training ») “contribueraient plus à l’amélioration de la performance plutôt qu’à la prévention des blessures”, selon Mahler et al. (2016)38. Si bien qu’aujourd’hui, on a tendance à revoir notre concept de la prophylaxie comme un procédé visant à limiter la gravité des blessures plus que de prévenir leur apparition. Puisqu’au final nous ne pouvons empêcher leur survenue. “De nouveaux traitements sont en cours de recherche et de développement, mais la prévention par le renforcement musculaire, des exercices d’étirement et d’équilibre musculaire continuent d’être le meilleur «traitement»” (Barroso et Thiele, 2015). Plutôt que traitement, on dira que la musculation est un outil, « un moyen de », certainement pas un remède.

Effectivement de nouveaux procédés comme l’utilisation des bandes élastiques (un dossier Sci-Sport), sont en pleine expansion dans le monde de l’entraînement. En complément, en association voire en alternative de la musculation classique avec charges libres, ce type de procédé intégratif ne cesse de faire ses preuves et offre de nouvelles perspectives à tous les entraîneurs et préparateurs physiques. Certains ayant même fait de ces bandes élastiques, l’outil de base de leur système d’entraînement, à l’instar de PRO-FTS™. Pour autant, dans le milieu singulier du football où les intérêts économiques, marketing, médiatiques prennent le pas sur le reste, donne-t-on à l’approche préventive et à ces nouveaux procédés toute la place qu’ils mériteraient ?

Rien n’est moins sur si on s’arrête aux propos surprenants d’Arsène Wenger en plein direct (sur BeIN Sport) lors de l’Euro 2016. Durant l’échauffement de l’équipe nationale de République d’Irlande en huitième de finale contre la France, on voit les joueurs irlandais réaliser des exercices avec élastiques. Suite à une question posée par Alexandre Ruiz sur cette pratique, Arsène Wenger se fend d’un « je suis sceptique … je ne pense pas que cela serve à grand-chose. » Là aussi nous sommes en droit de nous poser des questions sur l’intérêt que le manager d’un des plus grands clubs européens (Arsenal FC, si besoin de le rappeler), porte sur ces nouvelles approches et procédés, aussi représentatif soit-il dans le milieu du football. D’autant que certains de ces joueurs connaissent ces pratiques. Monsieur Wenger si jamais vous me lisez.

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Thomas Müller et Mesut Özil effectuant des exercices de renforcement sur powerplate avec des élastiques en préparation de la demi-finale contre la France à l’Euro 2016 (Source : La Maanschaft)

Aussi, je me permets ces quelques mots à l’attention de toutes celles et ceux qui entraînent, des mots repris du dernier ouvrage de Thierry Maquet et Rachid Ziane : “Il est souhaitable que les entraîneurs se tiennent informés des innovations et des recherches conduites dans le cadre de l’optimisation de la performance. Mais il est important aussi de savoir faire la part des choses. Les expériences menées dans des contextes particuliers ne sont pas toutes transférables stricto sensu sur le terrain. Entraîner, c’est gérer de l’humain, donc de la complexité, avec une multitude de paramètres en interaction.

Certains éléments peuvent être pris en compte, d’autres pas, car on entraîne généralement un groupe d’individus marqués par des caractéristiques et des caractères singuliers. Les travaux de recherche sont alors des explications, des pistes de réflexion, des réponses supplémentaires à disposition pour faire face à la complexité, mais ils ne constituent pas la réponse absolue aux problématiques de l’entraîneur. Entre applicationisme et imperméabilité à la science, il convient de trouver un juste milieu.”

Et si dans cette quête de l’excellence, c’était ailleurs qu’il fallait chercher …

Si vous êtes parvenus jusqu’au bout, vous aurez bien droit à une petite boutade. J’en entends certains dire, “déjà que la prépa c’est chiant, mais en plus c’est compliqué”. Non, il faut juste apprendre à la comprendre. Un peu comme une femme 😉.

Bonne reprise à tous !

Pour toute question ou retour : n’hésitez pas à me contacter via mon site ou ma page professionnelle Facebook.


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olivier-allain

Rédigé par

Préparateur physique et réathlétiseur

Bibliographie

  • Dellal A. La prépa physique football : une saison de vivacité. 4Trainer Editions, 2015.
  • Reiss D, Prévost P. La bible de la préparation physique. Amphora, 2013.
  • Vestiaires magazine n°71 : spécial préparation physique. Juillet-août 2016

Références

Références
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2Type of sport is related to injury profile: a study on cross country skiers, swimmers, long-distance runners and soccer players. A retrospective 12-month study.
3Time trends for injuries and illness, and their relation to performance in the National Basketball Association.
4Squad management, injury and match performance in a professional soccer team over a championship-winning season.
5Injuries among Spanish male amateur soccer players: a retrospective population study.
6If overuse injury is a ‘training load error’, should undertraining be viewed the same way?
7Off-Season & In-Season Fitness Training for Football (Soccer).
8Strength training for athletes: does it really help sports performance?.
9, 27The effects of resistance training on endurance distance running performance among highly trained runners: a systematic review.
10Physical Demands of Different Positions in FA Premier League Soccer.
11Aerobic endurance training improves soccer performance.
12Straight sprinting is the most frequent action in goal situations in professional football.
13Physiology of soccer: an update.
14Analysis of motor activities of professional soccer players.
15Match activities of elite women soccer players at different performance levels.
16Fitness profiling in soccer: physical and physiologic characteristics of elite players.
17Muscle injuries in athletes.
18Return to play following muscle injuries in professional footballers.
19Hamstring injuries have increased by 4% annually in men’s professional football, since 2001: a 13-year longitudinal analysis of the UEFA Elite Club injury study.
20Reconditioning : a performance-based response to an injury, based on the book Sports injury prevention and rehabilitation : integrating medicine and science for performance solutions.
21The Transition Period in Soccer: A Window of Opportunity.
22Préparation physique : Prophylaxie et performance des qualités athlétiques.
23Norms for an isometric muscle endurance test.
24Exercises to activate the deeper abdominal wall muscles: the Lewit: a preliminary study.
25Essentials of Strength Training and Conditioning – 3rd Edition.
26L’agilité dans les sports collectifs.
28The importance of physical fitness for injury prevention: part 1.
29The Importance of Physical Fitness for Injury Prevention: Part 2.
30Approche moderne du développement de la force.
31Strength training in soccer with a specific focus on highly trained players.
32Effects of plyometric training on soccer players.
33Repeated-sprint ability – part II: recommendations for training.
34La résistance à la vitesse : Clé de la préparation physique en sports collectifs. CEP Dijon, 2007.
35Détermination et variation du profil physique du footballeur de très haut niveau : référence spéciale aux performances athlétiques selon les différents postes de jeu orientant sur la validation d’un test d’agilité.
36Improving repeated sprint ability in young elite soccer players: repeated shuttle sprints vs. explosive strength training.
37Conditioning Young Athletes.
38What does “preventive training” prevent in competitive sport?