Quels paramètres interviennent dans la formule du bilan énergétique ?
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Quels paramètres interviennent dans la formule du bilan énergétique ?

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Introduction

Il existe de nombreuses discussions dans le milieu du fitness sur la question de savoir si les régimes peuvent entraîner des perturbations du métabolisme. Pour séparer les faits de la fiction, nous étudieront la formule de la perte de poids avec ces nombreux paramètres. Je te montrerai aussi pourquoi les régimes éclair pourraient avoir un lien direct avec tes difficultés à maintenir ton poids.

Pour commencer, tu fais surement de la musculation (ou un autre sport) régulièrement et intensément (normalement), et tu manges avec modération, et pourtant tu ne perds pas de poids (ou tu ne perds pas aussi vite que tu le voudrais ou que tu t’y attendais).

Autre cas de figure possible, tu perds du poids constamment, même mettant beaucoup de bonne volonté pour en prendre.

Une question qui revient souvent : est-ce que le métabolisme peut être au ralenti ou en panne ?

Pas exactement.

Mais le fait de grossir ou de perdre du gras peut modifier la façon dont ton corps régule son poids.

Pour comprendre cette réponse, nous allons explorer le fonctionnement réel du métabolisme humain, avec un peu de thermodynamique et de régulation métabolique.

Le bilan énergétique : les lois de la physique s’appliquent toujours.

Tu as besoin d’une certaine quantité d’énergie (sous forme de calories) pour rester en vie et pour te déplacer. Cette énergie peut provenir de la nourriture ou de l’énergie emmagasinée (par exemple les tissus adipeux).

En théorie

Si tu consommes moins d’énergie que tu n’en dépenses, tu devrais perdre du poids.

Si tu fais le contraire (c’est-à-dire si tu manges plus d’énergie que tu n’en dépenses), tu devrais prendre du poids.

En résumé

L’évolution des réserves de corps* = Énergie absorbée – Énergie consommée

*j’utilise le terme “réserves du corps” délibérément, car il représente les tissus disponibles en cas de dégradation (graisse, muscle, organe, os, etc.) et exclus l’eau (qui peut modifier le poids du corps indépendamment de l’équilibre énergétique).

Cette relation entre “l’entrée et la sortie d’énergie” est l’équation du bilan énergétique, et c’est le modèle le plus couramment utilisé pour calculer le bilan énergétique d’une personne ainsi que la quantité de poids qu’elle perdra ou gagnera avec le temps.

Bien que cette formule permette de déterminer le poids de chaque individu, elle ne nous renseigne pas grand-chose sur la composition corporelle, qui est influencée par des variables comme les taux d’hormones sexuelles, l’apport en macronutriments (surtout les protéines), le style, la fréquence et l’intensité de son activité physique, l’âge, la consommation de médicaments, les prédispositions génétiques, etc.

Il est donc naturel que les gens soient frustrés et se sentent perdus avec cette équation du bilan énergétique lorsque les chiffres ne semblent pas correspondre à leurs attentes. (C’est d’ailleurs une bonne leçon sur l’importance d’adapter ses attentes à la réalité observable.)

Chose importante :

Cette différence entre les attentes et la réalité n’est pas due au fait que l’équation du bilan énergétique est erronée ou qu’il s’agit d’un mythe. Le corps de personne ne défie les lois de la physique, même si cela semble parfois être le cas.

C’est parce que l’équation est plus compliquée qu’elle n’y paraît.

De nombreux autres facteurs influent sur l’équation du bilan énergétique; et ils ne se combinent pas les uns aux autres. Ce que tu apportes en énergie “l’énergie absorbée” a une influence sur ce qui arrive à la “sortie d’énergie ou énergie dépensée”. Et vice versa.

“Manger moins, bouger plus” est un bon début. (La plupart d’entre nous avons probablement intérêt à manger un peu moins et à faire un peu plus de sport au quotidien.)

Mais ce conseil ne suffit pas, car il ne tient pas compte de la complexité de plusieurs facteurs interdépendants.

Examinons donc certains de ces facteurs, en commençant par la partie “énergie” de l’équation.

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“L’entrée d’énergie” n’est pas aussi simple que tu le penses.

Raison 1 : Le nombre de calories contenues dans un repas ne correspond probablement pas au nombre de calories indiquées sur les étiquettes ou dans le menu.

Cela peut sembler difficile à croire, mais c’est vrai… la façon dont les fabricants présentent leurs estimations de calories et des éléments nutritifs est incroyablement imprécise et obsolète. Par conséquent, les étiquettes des aliments peuvent être déconnectées de 20 à 25 % par rapport à la réalité.

Et même si ces étiquettes étaient correctes :

Raison 2 : La quantité d’énergie qu’un aliment contient sous forme de calories n’est pas nécessairement la quantité d’énergie que nous absorbons, stockons et/ou utilisons. 

N’oublie pas que les aliments que nous mangeons doivent être digérés et transformés par notre corps. Les innombrables étapes de la digestion, de traitement, d’absorption, de stockage et d’utilisation – ainsi que notre constitution physiologique individuelle – peuvent tout changer sur le plan du bilan énergétique.

Par exemple :

Nous absorbons moins d’énergie des hydrates de carbone et des graisses, parce qu’ils sont plus difficiles à digérer.

Nous absorbons plus d’énergie des hydrates de carbone et des graisses hautement raffinées, car ils sont plus faciles à digérer. (Penses-y de cette façon: plus un aliment est “transformé”, plus le travail de digestion a déjà été réalisé pour toi.)

Par exemple, des études ont démontré que nous absorbons plus de graisse du beurre de cacahuète que des cacahuètes entières1. Les chercheurs ont en effet découvert que près de 38 % de la graisse des cacahuètes était excrétée dans les selles, plutôt qu’absorbée par le corps. Alors que la totalité de la graisse du beurre d’arachide était absorbée.

De plus :

Nous absorbons souvent plus d’énergie des aliments cuits (et/ou hachés, trempés, mixés) parce que ces méthodes de préparation décomposent les cellules végétales et animales, augmentant ainsi leur biodisponibilité.

Lorsque nous consommons des féculents crus (comme les patates douces), nous absorbons très peu de calories. Cependant, après la cuisson, les amidons sont beaucoup plus disponibles, triplant le nombre de calories absorbées.

Il est intéressant de savoir que le fait de laisser refroidir les féculents avant de les consommer diminue la quantité de calories que nous pouvons à nouveau en extraire.

Pour finir :

Nous absorbons plus ou moins d’énergie selon le type de bactéries présentes dans notre intestin.

Certaines personnes ont de plus grandes populations de bactéroïdètes (une espèce de bactéries), qui sont plus aptes à extraire les calories des parois résistantes des cellules végétales par rapport à d’autres espèces de bactéries.

Voici un exemple intéressant de tout ce processus mis en œuvre. Récemment, des chercheurs ont demandé à des participants de consommer 45 grammes de noix par jour pendant trois semaines2.

Ils ont découvert qu’en moyenne, les gens n’absorbaient que 146 des 185 calories contenues dans les noix. Cela représente 79 % de la valeur calorique indiquée sur l’étiquette.

Dans des études similaires, les gens n’ont absorbé que 80 % des calories contenues dans les amandes et 95 % des calories contenues dans les pistaches.

Au-delà des différences moyennes, il y avait des différences individuelles : certaines personnes absorbaient plus d’énergie dans les noix, tandis que d’autres en absorbaient moins (probablement à cause des populations différentes de bactéries dans leurs gros intestins).

  • En fin de compte, en ayant une alimentation riche en aliments complets et peu transformés, le nombre de calories que tu absorbes peut être significativement inférieur à ce que tu imagines. Et en plus, ils ont besoin de plus de calories pour être digérés.
  • Inversement, tu absorberas plus de calories en mangeant beaucoup d’aliments transformés et brûleras moins de calories dans le processus digestif. (À cela s’ajoute le fait que les aliments fortement transformés sont moins rassasiants, plus denses en énergie et plus susceptibles de donner envie de se suralimenter.

Puisque le nombre de calories que quelqu’un pense consommer peut varier de 25 % (ou plus), l’apport quotidien de 1 600 calories pourrait en réalité se situer entre 1 200 et 2 000.

En plus de tous ces aspects, il y a aussi plusieurs facteurs génétiques et environnementaux qui influencent la quantité d’énergie absorbée. On a tous des différences morphologiques, certains sont grands, certains petits, etc.

Certaines personnes auront aussi une sécrétion d’hormones digestive moins importante, une capacité d’absorption intestinale moins grande, et une flore bactérienne qui ne dégrade que peu de chose.

Cela peut être ce genre de personne qui mange sans cesse, mais qui n’arrive pas à prendre de poids. Même en avalant une quantité exacte de calories par rapport à une autre personne, aucun de vous n’aura absorbé la même quantité d’énergie (en ne prenant en compte que l’aspect génétique).

Après, comme je l’explique ci-dessus, si en plus il y en a un qui absorbe 1000 kcal de beurre de cacahuète et l’autre 1000 kcal de cacahuètes, il risque d’y avoir au final une énorme différence en prenant en compte tous les paramètres et il n’est pas impossible qu’une personne absorbe 500 kcal sur les 1000 kcal et l’autre personne la totalité des 1000 kcal.

Pour simplifier le plus possible :

Énergie absorbée = calories consommées – calories non absorbées

Comme tu peux le voir, il y a une grande marge d’erreur concernant l’apport énergétique, même si tu comptes les calories de façon rigoureuse. Cela ne signifie pas que l’équation du bilan énergétique est incorrecte. Cela signifie juste que si tu veux faire un calcul précis, tu devrais vivre dans un “laboratoire métabolique”.

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“L’énergie dépensée” varie beaucoup d’une personne à l’autre.

Elle aussi, l’énergie dépensée par le métabolisme basal et tes dépenses liées aux activités physiques est une variable dynamique en constante évolution. Ce mécanisme complexe comporte quatre éléments-clés :

Métabolisme de base

Le métabolisme de base correspond au nombre de calories que tu brûles chaque jour au repos, juste pour respirer, penser et vivre.

Cela représente environ 60 % de tes “pertes d’énergie” et dépend du poids, de la composition corporelle, du sexe, de l’âge, de la prédisposition génétique et possiblement (encore) de la population bactérienne de ton intestin.

Un plus grand corps a en général un métabolisme basal plus important.

Par exemple:

Un homme de 65 kilos peut avoir un métabolisme basal de 1583 calories par jour.
Un homme de 80 kilos peut avoir un métabolisme basal de 1905 calories.
Un homme de 100 kilos peut avoir un métabolisme basal de 2164 calories.

Ce qui est crucial de comprendre, c’est que le métabolisme basal varie jusqu’à 15 % d’une personne à l’autre. Si tu es ce mec de 80 kilos avec un métabolisme basal de 1905 calories, un autre gars comme toi pourrait brûler 286 calories de plus (ou moins) chaque jour sans plus (ou moins) d’effort.

L’effet thermique des aliments ou thermogenèse alimentaire

Cela peut te surprendre, mais il faut beaucoup d’énergie pour digérer les aliments. La digestion est un processus métabolique très actif. C’est ce qui explique pourquoi tu as des coups de chaud voire même des sueurs après un grand repas, surtout si celui-ci contenait beaucoup de protéines.

L’effet thermique des aliments ou thermogénèse induite par l’alimentation est le nombre de calories que tu brûles lorsque tu manges, digères et transformes les aliments. Cela représente entre 5 et 10 % de “perte d’énergie”.

En général, on brûle plus de calories pour digérer et absorber les protéines (20 à 30 % de ses calories) et les glucides (5 à 6 %) que les graisses (3 %).

Et comme mentionné précédemment, on brûle plus de calories en digérant des aliments complets et peu raffinés que des aliments hautement transformés.

L’activité physique

L’activité physique est la quantité de calories que tu brûles en faisant de l’exercice, comme marcher, courir, aller au cinéma, jardiner, faire du vélo, etc.

Évidemment, la quantité d’énergie dépensée par l’activité physique changera en fonction de la quantité d’énergie que tu vas utiliser.

Elle va aussi varier en fonction de la quantité de masse musculaire mise en jeu (les exercices polyarticulaires étant les plus énergivores).

Thermogenèse sans activité physique

Aussi appelé NEAT[/ref] (de l’anglais non-exercise activity thermogenesis), cela désigne tous les mouvements ou actions qui ne rentrent pas dans les dépenses liées à une activité physique : parler, taper du pied, jouer de la guitare, se tenir assis, taper sur un clavier, etc.

Cette dépense varie aussi d’une personne à l’autre et d’un jour à l’autre.

En résumé :

Énergie dépensée = métabolisme de base + thermogenèse alimentaire + activité physique + thermogenèse sans activité physique

Chacun de ces paramètres est très variable entre les individus. Ils sont aussi variables pour l’individu lui-même : en fonction du poids de l’âge, etc. Une même personne avec 10 kilos en plus ou en moins, ou de 10 ans de plus ou de moins ne dépensera pas le même nombre de calories.

Tout ceci pour te dire que la valeur “énergie dépensée” de la formule est aussi difficile à déterminer que la valeur “énergie absorbée”.

À retenir : bien que la formule du bilan énergétique semble simple, toutes ces variables font qu’il est difficile de connaître ou de contrôler exactement la quantité d’énergie que tu digères, absorbes, brûles et emmagasines.

Voilà la formule complète :

L’évolution des réserves de corps = [calories consommées – calories non absorbées] – [ métabolisme de base + thermogenèse alimentaire + activité physique + thermogenèse sans activité physique]

Quand tu essaies de manipuler ton corps et que cela ne fonctionne pas

Même si toutes les variables de la formule ci-dessus étaient fixes, l’équation du bilan énergétique serait assez compliquée. Mais les choses deviennent complètement insensées lorsque l’on considère que la modification d’une variable provoque des ajustements sur d’autres variables apparemment sans rapport.

Ceci n’est pas une mauvaise chose. Nos métabolismes humains ont évolué pour nous maintenir en vie et fonctionner lorsque la nourriture était rare.

Ce qu’il faut savoir :

Lorsque l’entrée d’énergie baisse, la sortie d’énergie diminue parallèlement (tu brûles moins de calories quand tu manges moins).

Inversement, quand “l’énergie absorbée” augmente, la quantité “d’énergie dépensée” augmente aussi (tu brûles plus de calories en mangeant plus).

Pour illustrer tout ça, voici comment le corps essaie de maintenir un poids stable lorsque tu consommes moins d’énergie et que tu commences à perdre du poids*.

  • La thermogenèse alimentaire diminue parce que tu manges moins.
  • Le métabolisme de base diminue parce que tu pèses moins lourd.
  • Les calories brûlées par l’activité physique diminuent puisque tu pèses moins lourd.
  • La NEAT baisse lorsque tu manges moins.
  • Les calories non absorbées diminuent et ton corps se met à absorber une plus grande quantité de calories.

En plus de ces facteurs qui influencent le résultat, la réduction des calories consommées entraîne également une augmentation des signaux de la faim, ce qui nous pousse à vouloir (et peut-être à manger) plus.

Le résultat est donc une perte de poids beaucoup plus modeste. Et dans certains cas, il peut même avoir une reprise de poids.

Pour couronner le tout, l’augmentation du taux de cortisol lié au stress d’une restriction alimentaire peut faire en sorte que notre corps conserve plus d’eau, ce qui fait que nous nous sentons “plus ramollis” et “moins maigres” que nous le sommes réellement.

Fait intéressant, ce n’est qu’un exemple de la réponse rapide et efficace suite à la manipulation d’une variable (dans ce cas-ci, les calories consommées). Il y a des réponses semblables lorsqu’on essaie de manipuler chacune des autres variables de l’équation.

Par exemple, les études scientifiques montrent que l’augmentation de l’activité physique au-delà d’un certain seuil (sans parler de surentraînement) peut déclencher :

  • Une augmentation de l’appétit avec plus de calories consommées.
  • Une diminution des calories non absorbées, car nous absorbons plus de ce que nous mangeons.
  • Diminution du métabolisme de base
  • Diminution de la thermogenèse sans activité physique

En fin de compte, ce ne sont là que deux des nombreux exemples que je pourrais te donner. Le fait est que le métabolisme est beaucoup plus compliqué (et interdépendant) que la plupart des gens ne le pensent.

Par conséquent, le fait de savoir “ce qui fonctionne” pour toi, ou de compter les calories, ne te permettra pas toujours d’obtenir les résultats attendus. Au fur et à mesure que ton équilibre énergétique évolue, tes stratégies pour perdre du gras ou maintenir ton poids doivent aussi évoluer, d’où l’intérêt de tenir un carnet alimentaire.

Quelques lectures recommandées

Pour continuer ta lecture, je te recommande cet excellent article riche en bons conseils pour réussir un régime. Si tu as des difficultés à perdre du gras au niveau du ventre, voici aussi un autre très bon article à lire : comment perdre la graisse abdominale. Pour terminer, je te conseille de jeter un coup d’œil sur ce dossier simple et instructif : les mécanismes de la faim.
jimmy-thai

Rédigé par

Fondateur de Espace-Musculation.com

Références

Références
1Mattes, Richard D., et al. « Impact of Peanuts and Tree Nuts on Body Weight and Healthy Weight Loss in Adults ». The Journal of Nutrition, vol. 138, no 9, septembre 2008, p. 1741S-1745S. PubMed, doi:10.1093/jn/138.9.1741S. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/18716179
2Walnuts Have Fewer Calories than the Label Suggests, ARS Researcher Discovers. https://www.usda.gov/media/blog/2015/12/03/walnuts-have-fewer-calories-label-suggests-ars-researcher-discovers. Consulté le 13 novembre 2019.